Une baie, un horizon, une découverte, un passé falsifié, ou simplement un frère... [Ethan]

Il est 10 heures lorsqu'Amy pose enfin son regard sur la vue magnifique qu'offrait la baie de San Francisco. Il n'y a pas si longtemps la jeune femme découvrait que sa famille était bien plus grande qu'elle n'aurait pu l'imaginer. New York cette ville qu'elle ne connaissait qu'à travers les différents films à l'eau de rose qu'elle pouvait regarder avec ses amies, venait de lui offrir un retour en arrière spectaculaire. Peut-être que la jeune femme n'était pas assez proche de sa mère pour pouvoir la comprendre et pourtant, aujourd'hui à son âge, elle avait pris une tout autre direction. Si Amy en est arrivée à donner un rendez-vous à un inconnu ici, sur la baie de San Francisco, c'est parce qu'elle était tombée sur une photo d'un petit garçon dans le grenier en cherchant une tenue pour le mariage de sa meilleure amie, il y a deux mois de cela avant de partir pour la Grèce. Qui pouvait t-elle si toute les plus belles robes étaient rangées dans une malle au grenier ? Sa curiosité l'avait poussée à ouvrir les tiroirs du vieux bureau de sa mère encore intact mais poussiéreux après toutes ces années. Au dos, un nom "Hauwkins" et un prénom "Ethan". Le bambin ne devait pas avoir plus de 3 ans, mais la photo jaunie par les années, laissée penser qu'aujourd'hui il devait avoir quelques années de plus qu'Amy. Instinctivement la jeune femme était allée demander à sa mère qui était cet enfant sur la photo, en pensant que ça ne serait qu'un cousin de plus dans la famille Woodsen. Mais à sa plus grande surprise sa mère, se mit à pleurer et claqua la porte sans explications. Et après une recherche qui ne lui pris que quelques jours et grâce à l'aide de sa grand-mère, elle découvrit le poteau rose. Décidé à ne pas être comme ça mère, elle décida de faire sa connaissance. Culottée, oui mais avec tact. C'est comme ça que cette lettre arriva dans la boîte au lettre du jeune homme en question :

Cher Ethan,

Je sais que cette lettre va te surprendre, et encore plus lorsque tu connaîtras l'histoire au complet. Il y a quelques jours, en fouillant par curiosité dans l'un des bureaux de ma mère mis au grenier car il était de la dernière mode, j'y ai découvert cette photo que tu trouveras ci-joint avec cette lettre. J'imagine que tu vas immédiatement te reconnaître. Les raisons pour laquelle cette photo se trouvait chez moi, sont nombreuses et inimaginables mais venant de ma famille plus rien ne me surprend. Il semble y avoir une multitude de secret autour de moi. Ce que j'ai découvert, je préfère te le dire en face, afin de pouvoir t'expliquer, car ce genre de chose ne se dit pas dans une lettre, ni un SMS et encore moins par téléphone. De plus je n'ai eu accès qu'à ton adresse. Maintenant si tu veux savoir qui tu es vraiment, je te propose de venir me rejoindre le Vendredi 23 Main à 10H30 près de la baie de San Francisco.

Amy W. Forester

La jeune femme était maintenant accoudée à l'une des barrières dans l'espoir que son frère viendrait, s'il était comme elle, alors sa curiosité serait la plus forte, et son intuition lui disait qu'il viendrait. Ses cheveux volant au vent, la fit frissonner, elle posa instinctivement une main sur son ventre et attendit patiemment.

Invité

La matinée était à peine entamée mais déjà le soleil dardait ses rayons brûlants sur la ville. Pourtant, je n’étais pas incommodé par la chaleur. Les poings enfoncés dans les poches de mon jean usé, j’avançai d’un pas rapide dans les rues de San Francisco. Plongé dans mes pensées, je ne prêtais pas vraiment attention à ce qui m’entourait, gardant juste assez de vigilance pour suivre le bon chemin. Moi qui habituellement ne sortait jamais sans quelque lecture à poursuivre au grand air, je n’avais même pas pris la peine ce matin là d’emporter ne serait-ce que le moindre petit recueil. Non, tout ce que j’avais dans la poche de ma veste en toile, c’était un morceau de papier un peu froissé à force d’être plié, déplié et replié. Une lettre, arrivée deux jours plus tôt dans ma boîte aux lettres et qui avait soulevé maintes interrogations.

J’arrivai en vue de la baie de San Francisco et de son panorama grandiose. D’un coup d’œil rapide, je consultai ma montre. 10h15… j’étais en avance. Dans deux petites minutes, je serai arrivé au lieu de rendez-vous. Stoppant ma marche, je m’appuyai dos au mur à côté de moi et ressortis la lettre de ma poche. Dès la première lecture, j’en avais retenu chaque mot, comme à chaque fois que je parcourais un texte. Pourtant depuis deux jours, je ne cessais de la relire, comme si son contenu pouvait changer, comme si les mots avaient pu m’abuser, comme si j’avais besoin de vérifier que j’avais bien lu ce que ma mémoire avait enregistré.

Ces quelques lignes ne révélaient pas grand-chose mais soulevaient pourtant moult interrogations. Mais le plus troublant, c’était cette photo. J’avais beaucoup changé certes depuis l’époque où elle avait été prise, mais le doute n’était pas permis, c’était bien moi qu’elle représentait. J’avais vu suffisamment de photos de moi enfant pour ne pas me tromper. Ce qui m’était totalement étranger en revanche, c’était le décor autour. Qui avait pris cette photo et que représentait-elle ? Voilà les deux questions auxquelles j’espérais avoir une réponse.

Détachant mon regard de la missive, je me tournai à nouveau vers ma destination. Il n’y avait pas encore beaucoup de monde à cette heure et je n’eus aucun mal à repérer une jeune femme blonde qui, accoudée à la balustrade, me tournait le dos. C’était sans aucun doute elle l’auteur de la mystérieuse lettre. Et par sa présence, elle matérialisait les bouleversements que je voyais arriver dans ma vie. Il me semblait être au cœur d’un roman de gare, personnage prisonnier du bon vouloir d’un écrivain et qui ne peut que subir les rebondissements de l’histoire. Je commençai alors à douter. Avais-je vraiment envie de savoir ce qu’il en était ? Elle ne m’avait pas vu, je pouvais encore faire demi-tour.

Mes yeux, rendus gris par l’incertitude, se posèrent à nouveau sur la photo. Un profond soupir s’échappa de mes lèvres tandis que je faisais un pas en avant, prêt à franchir les derniers mètres qui me séparaient du point de rendez-vous. Sans un mot, je m’approchai de la jeune femme qui ne s’était toujours pas retournée. À mon tour, je m’accoudai à la barrière à ses côtés. Je posai alors la photo jaunie sur le rebord et la poussant de mes deux doigts, je la fis glisser jusqu’à elle.

- C’est à toi je crois.

Je regardais pensive en caressant mon ventre, la mer qui s'agitait. Bercée par le bruit des vagues, j'inspirai l'air frais qui venais jusqu'à moi. Mon voyage en Grèce m'avait fait énormément de bien mais j'y avais appris pas mal de chose. La vie est parfois bien plus complexe qu'il n'y parait. Accoudée à la barrière, songeuse, je me demandais à quoi ressemblait mon frère aujourd'hui. Je l'avais imaginé de tellement de façon différentes. Dans la lettre j'y avais mis une photo de moi, pour qu'il puisse m'identifier en me voyant. Et alors que je repensais à toute cette histoire, une ombre s'approcha doucement de l'endroit d'où j'explorais la mer. Je n'avais pas bougé, j'attendais préservant ainsi la surprise. Puis une voix s'éleva vers moi. Elle était douce, masculine. Si je devais continuer à la décrire j'utiliserai les mots posées et calme. Je tournais alors ma tête vers l'endroit d'où provenait sa voix. C'est là que je le vis, ces yeux, cet expression, ce regard lointain, il n'y avait aucun doute.

Elle se surpris à le détailler doucement, comme une petite sœur qui admirerait son grand frère parce qu'il aurait remporté le trophée du meilleur joueur de football. Puis avec un sourire en coin, elle pris la photo qu'il glissa jusqu'à elle. Et la regarda silencieusement, car derrière se trouvait toute une histoire, la leurs. Elle la fit de nouveau glisser vers Ethan avant de lui répondre.

Non, en fait c'est à notre mère ! Dis-je calmement.

Pendant ces deux mois, elle avait fait un énorme travail sur sa personnalité. Dorénavant la Amy qui partait au quart de tour, n'existe plus. La jeune femme avait mûris, sans vraiment avoir le choix. Calme, sereine et posée, elle était déterminée à découvrir la vérité.

Invité

Amy prit la photo dans ses mains tandis que je gardais le regard tourné vers la mer, attendant qu’elle prenne la parole. Il y avait une part d’appréhension dans cette attente et il me semblait que le temps s’écoulait soudain plus lentement. Le regard perdu dans l’horizon, je n’osais pas la regarder tout de suite. Je pressentais que mon univers, tout ce qui faisait mon histoire allait être remis en question d’un instant à l’autre. C’était comme si contempler son visage rendrait tout ceci réel et je voulais savourer encore quelques secondes la sécurité de mon ignorance. Alors elle me rendit la photo en répondant d’une voie calme.

- Non, en fait c'est à notre mère !

Je pris le petit rectangle de papier glacé entre mes doigts et contemplait en silence ce morceau de passé qui m’arrivait en pleine figure. Je pris conscience qu’au fond de moi, j’avais déjà compris à l’instant même où j’avais lu sa lettre pour la première fois. À présent qu’elle mettait des mots sur toutes ces interrogations, l’appréhension laissa la place à une forme d’apaisement. Après les questions venaient les réponses et je pouvais retrouver ma sérénité. C’était une étrange sensation. Alors que tout mon univers basculait, que toutes mes certitudes volaient en éclat et que mon monde s’écroulait autour de moi, il me semblait n’avoir jamais été aussi calme.

Je finis par remettre la photo dans ma poche et tournai enfin la tête vers Amy. En plongeant mon regard dans ses grands yeux bleus, je compris que quelque part, j’avais toujours su. Pour autant que je me souvienne, tout le monde sans exception dans ma famille avait les yeux marron, voire noirs. Et je m’étais toujours demandé d’où me venait ce regard clair si énigmatique mais sans jamais vraiment poser la question. Aujourd’hui, j’avais la réponse. Soupirant, je détournai le regard et d’un signe de tête, l’invitai à poursuivre notre conversation en faisant quelques pas.

- Je suppose que tu dois avoir pas mal de choses à me dire ?

Toujours songeuse, elle ne sentit pas le regard d'Ethan posé sur elle. Ce n'était qu'une question de temps avant que ce dernier ne la regarde pour évaluer la situation. Bien sûr, cela ne se fit pas attendre. Compréhensive, elle savait à quel point c'était dure de voir s'envoler ses certitudes du jour au lendemain. Vous avez cette impression qu'un ouragan, une tempête est venue tout ravager et qu'il ne vous reste plus qu'à tout reconstruire. Pire vous devez apprendre qui vous êtes et d'où vous venez, alors que vous pensiez tout savoir de votre passé. Elle acquiesça lorsqu'il lui proposa de marcher un peu tout en discutant.

Oui mais par quoi allait-elle commencer ? Peut-être devait-elle se présenter, ou bien simplement commencer par lui dire où elle avait trouvé cette photo ? Non ça, il le savait déjà. Pourquoi se triturer les méninges alors que tout peut être plus simple. Lui dire simplement d'où il vient, sa ville d'origine, là où son père et sa mère ont grandit et où ils se sont rencontrés.

Elle marchait doucement, laissant le vent s'engouffrer dans ses cheveux. Puis regarda Ethan ranger la photo dans sa poche de Jean. Plusieurs sentiments se mêlaient en elle. Amy était à la fois heureuse de pouvoir enfin mettre un visage sur un nom mais elle était aussi inquiète par la réaction du jeune homme qui devait avoir pas plus de 4 ans de plus qu'elle. De toute façon, la vérité se sait toujours tôt ou tard. Alors la jeune femme se lança.

- Oui j'espère que tu es prêt à tout entendre. Tout d'abord je veux que tu saches que je n'ai pas voulu chambouler ta vie mais je me suis mis à ta place, et j'aurais aimé qu'on me dise la vérité et puis tu l'aurais su tôt ou tard j'en suis sûr.

- Bref, bizarrement j'ai fait cette découverte avant de partir en Grèce à Athènes, c'est là que notre mère et mon père sont nés et ont passés leurs adolescences. Conclusion, je suis grecque et tu es d'origine grecque. Parce que nous n'avons pas le même père, pour commencer j'ai appris que tu avais été adopté par ma grand-mère et curieuse comme je suis j'avais envie de te connaître.

Elle s'arrêta un instant, laissant le temps au jeune homme d'intégrer tout ce qu'elle était entrain de lui apprendre. Son regard posé sur l'horizon, laissé croire qu'elle redoutait sa réaction, le cœur serrait.

Invité

L’adoption… finalement c’était logique. Ça ne pouvait être que ça à bien y réfléchir. Mais pourquoi ne m’avait-on rien dit ? Je serrai les mâchoires, pris d’un soudain élan de rancœur vis-à-vis de ceux qui m’avaient élevé. Je comprenais soudain pourquoi je n’avais ressenti de lien particulier entre cette famille et moi. Pourquoi du jour au lendemain, j’avais tout quitté sans laisser de possibilité de me joindre. D’ailleurs, si mon nom n’avait pas été enregistré dans les registres d’inscription de l’université, jamais Amy n’aurait pu retrouver ma trace.

Et cette famille qui me tombait du ciel. Que devais-je en penser ? Certes les liens du sang nous unissaient inévitablement. Mais qui avait-il de plus ? Il aurait été hypocrite de prétendre à une quelconque entente fraternelle. Et pourtant, en apprenant mon existence, Amy avait fait la démarche de me retrouver, de me connaître. N’était-ce que de la curiosité comme elle le disait ou y avait-il une réelle volonté de sa part de rattraper un peu de ce dont on nous avait privés ?

Toutes ces questions tournaient dans ma tête sans trouver de réponse. Je finis par m’arrêter de marcher et m’adossai à la balustrade que nous étions en train de longer. J’avais à nouveau enfoncé mes poings dans mes poches et je fixais le sol, ne sachant quoi prendre comme décision. Je levai alors les yeux vers Amy et je vis clairement son inquiétude. De toute évidence, elle craignait ma réaction et ses doutes eurent raison des miens. Elle était sincère dans sa démarche et pour cette raison, je me devais de lui donner une chance.

- Je ne sais pas trop quoi te dire en fait. Tout ça est si soudain… Et en même temps ça ne me surprend pas.

Les mots s’embrouillaient dans mon esprit. Je n’avais jamais été très doué pour dire les choses. Et puis que dire ? Je ne pouvais pas lui sauter dans les bras en criant sur les toits que j’étais fou de joie de faire sa connaissance. Je secouai la tête, trahissant mon désarroi.

- Tout est assez confus dans mon esprit. Je ne sais même plus à qui je dois en vouloir. Si je dois en vouloir à quelqu’un d’ailleurs.

Je laissai échapper un soupir las avant de poursuivre.

- Il va me falloir du temps pour digérer tout ça et quelque chose me dit que tu n’en as pas fini. Autant aller jusqu’au bout puisqu’on a commencé. Peut-être que j’y verrai plus clair ensuite.

Je me décidais à ne plus éviter son regard et à lui faire face. J'avais vraiment envie d'apprendre à la connaître mais comme lui, j'aurais sans doute eu la même réaction. Comment peut-on accepter un changement en si peu de temps ? C'était humainement impossible. Je n'avais pas besoin de prendre sur moi, le temps n'était pas compté, non bien sûr qu'on ne rattrape pas 20 ans comme on rattrape un ballon mais au fil du temps, la jeune femme espérait pouvoir tisser des liens, se rapprocher de ce frère qui jusqu'à lors n'existait que dans ses rêves.

Je le suivis et me mis face à lui lorsqu'il s'arrêta. Je souriais en essayant de lui faire comprendre que quoi qu'il arrive, j'étais capable de l'accepter et de le comprendre. La confusion était un bien simple mot. Elle avait vécu exactement la même chose lorsqu'elle avait découvert l'existence de Cooper sa demi soeur et de son don. Lorsqu'on découvre que notre vie n'est qu'un tissu de mensonge, alors on préfère ne pas y croire jusqu'au jour où il nous faut réaliser pour avancer. La jeune femme se décida à continuer, elle irait jusqu'au bout et lui laisserai le choix d'agir comme bon lui semble.

- Tu n'as pas besoin de te justifier ou de dire quoi que se soit je comprends.

- Effectivement, j'ai continué à chercher et j'ai découvert que notre cher proviseur Seely Booth et ma mère avait eu une très courte liaison lorsqu'ils étaient à l'université ! La suite tu dois l'imaginer assez facilement. Elle est tombée enceinte à 17 ans mais ses parents avaient certainement d'autres projets. Alors elle a accouchée sous X, puis a rencontré mon père quelques années plus tard. Ma grand-mère paternelle m'a raconté, qu'elle avait su la première fois qu'elle la rencontré qu'elle cachée un lourd secret qui lui pesait plus que tout. Je ne sais pas si ça peut t'apporter quelque chose, mais ma mère ne se confie jamais pas même à la sienne et lorsqu'elle la fait avec sa belle-mère, c'était avec douleur. Elle semblait t'avoir aimé dès le premier jour, mais les obligations sont les obligations. Et je comprends mieux pourquoi elle est ainsi aujourd'hui. Je crois qu'elle ne t'a jamais oublié et la photo en ai la preuve.

Je m'arrêta, peut-être que ce que j'étais entrain de dire n'avait aucun sens pour lui mais pour moi cela devenait de plus en plus clair. Le comportement de Booth avec moi et celui de ma mère toujours très distantes, non il y avait semble t-il autre chose.

Invité

Finalement, Amy reprit son récit, m’apprenant qui était mon père. L’ironie de la situation dessina un léger sourire sarcastique sur mes lèvres mais je la laissai poursuivre sans faire de commentaire. Je l’écoutai me parler de sa mère… notre mère… J’avais encore du mal à me faire à cette idée. Si je commençai à concevoir l’idée qu’Amy soit ma demi-sœur, j’avais encore du mal à considérer cette inconnue dont elle me parlait comme étant ma mère. Lorsqu’elle eut terminé, je consentis à afficher un sourire à la fois ironique et résigné.

- Au moins je sais de qui je tiens mon caractère solitaire et réservé.

Je ne savais pas trop quelle attitude adopter vis-à-vis de cette mère dont l’amour n’avait malgré tout pas été assez fort pour vaincre la pression familiale. Il me semblait éprouver un mélange contradictoire de rancœur et de compassion et je ne savais lequel des deux choisir. Mais sans doute le choc était-il trop récent pour que je puisse véritablement prendre ce genre de décision. Je décidai donc je remettre à plus tard ma réflexion pour me concentrer sur qu’Amy venait de m’apprendre.

- Le destin est quand même un drôle de plaisantin… Pendant plus de six ans, j’ai parcouru tout le pays. J’aurais pu choisir de me poser n’importe où, mais c’est cette ville que j’ai choisie. Et j’apprends aujourd’hui que le directeur de l’université où je me suis inscrit sur un coup de tête est en réalité mon père biologique… J’aurais voulu le faire exprès que je n’y serais pas arrivé.

Ma déclaration me surprit moi-même. Cela devait faire des années que je n’avais pas fait de discours aussi long. Mais Amy ne me connaissait pas encore vraiment et sans doute n’en fut-elle pas étonnée. Mais moi, d’habitude si peu expansif, je ressentais le besoin de parler. J’avais besoin de savoir tout ce qu’elle avait à m’apprendre. J’avais besoin de comprendre. Il me semblait que si je n’avais jamais trouvé ma place au sein de ma famille adoptive, c’était en prévision de ce moment. Parce que c’était là que j’avais un rôle à jouer. J’ignorais si ce sentiment était dicté par la volonté de me raccrocher à quelque chose devant mon univers qui s’écroulait. Mais il me semblait que ce rôle nouveau de grand-frère à assumer ne me tombait pas dessus par hasard. Après quelques secondes de silence, je finis par reprendre la parole.

- Parles-moi de toi, de ta famille… de ma famille, je ne sais plus très bien.

Je posais mon regard sur ce frère qui semblait petit à petit prendre conscience de ce qui lui arrivait. Soudain je me surpris à à me demander comment j'aurait réagis si on m'avait appris que j'avais été adopté. Très mal sans doute, à une époque j'aurais envoyé tout balader sans me poser les bonnes questions, mais aujourd'hui ma réaction aurait certainement était différente. Ethan était très calme pour quelqu'un qui venait d'apprendre que toute sa vie, on lui avait mentit. Ma foi, je l'étais aussi mais pour d'autres raisons, j'étais celle qui lui apprenait et pour cela il fallait avoir une bonne dose de courage et de tact. Je savais maintenant qu'il m'était impossible de faire marche arrière, alors je poursuivis dans ma lancée.

- Je vais d'abord te parler de Demi Lovato Booth, je ne sais pas si tu la connais, mais son histoire est aussi compliqué que la notre. En réalité c'est ta Demi sœur, elle est la fille de Seely Booth et de son ex-femme qui est décédée le jour de son accouchement. Le proviseur n'avait pas été mis au courant, séparé de sa femme depuis quelques mois, il avait déménager pour obtenir le poste de proviseur, ici à Berkeley. Demi a donc été adopté par un couple français et à vécu en France jusqu'à aujourd'hui. Maintenant elle vit à San Francisco dans un petit appartement, et va aussi à Berkeley où elle suit des études de théâtre. C'est aussi ma meilleure amie, je l'ai rencontré lors d'un voyage en France, il y a quelques années. Elle a un sacré caractère et ressemble énormément à son père. Si tu veux la rencontrer, il te suffira de me demander !

Je m'arrêta de nouveau pour laisser Ethan prendre le temps de digérer, cette nouvelle, j'envisageai déjà de lui parler de son père après sa demi sœur pour finir avec ma famille. Mais chaque chose en son temps, il fallait lui laisser le temps de comprendre et d'assimiler toutes ces nouvelles.

Invité

Suite à ma demande, Amy reprit rapidement la parole. La tête baissée vers le sol, je l’écoutais tout en jouant avec un petit caillou du bout de ma chaussure. Je me sentais un peu mal à l’aise de me trouver devant cette inconnue tout en me disant qu’elle était de ma famille. Il y avait quelque chose d’illogique dans cette équation et je ne savais trop comment me comporter. J’en venais à envisager l’avenir et j’espérais qu’avec le temps, nous apprendrions à nous connaître et que mon malaise se dissiperait. Mais je n’eus pas vraiment le temps d’approfondir ma réflexion car je n’étais de toute évidence pas au bout de mes surprises.

Lorsque ma nouvelle sœur me parla de Demi Lovato en m’annonçant qu’elle aussi était ma demi-sœur, je levai brusquement la tête, surpris. N’écoutant plus que d’une oreille distraite le reste de l’histoire, je revoyais la petite brune de mon cours de théâtre. Je n’avais jamais vraiment prêté plus d’attention que ça aux membres de ma classe, mais j’avais remarqué dès les premiers jours le talent et la curiosité de Demi. Elle m’avait semblée alors à la fois pleine de vie et d’un autre côté un peu réservée. Comment avions-nous pu nous côtoyer pendant presque un an à chaque cours sans même soupçonner que nous avions le même père ?

Amy s’était tue, sans doute pour me laisser le temps d’assimiler cette nouvelle donnée dans l’équation. Je n’avais pas vraiment fait attention depuis combien de temps elle avait arrêté de parler mais je lui fus reconnaissant de me laisser briser le silence à ma guise. Après quelques instants, je finis par répondre, balbutiant presque sous l’effet de la surprise.

- Je connais Demi. Enfin pas personnellement, mais on est en cours ensemble.

Je détournai alors le regard et avisai un banc quelques pas plus loin. Je désignant à Amy, je rajoutai.

- Si tu dois continuer à me faire ce genre de surprises, on ferait peut-être mieux de s’assoir, non ?

Joignant le geste à la parole, je me redressai de mon appui sur la barrière et pris la direction du banc. Je m’y laissai tomber un peu lourdement, passant mes mains sur mon visage comme si une grande fatigue s’abattait soudain sur moi. Ma sœur pris place à côté de moi, attendant que je lui donne le feu vert pour poursuivre. Je me penchai légèrement en avant, les avant-bras posés sur les genoux et soupirai.

- Et ensuite ? Qu’est-ce que tu as d’autre à m’apprendre ?

Amy se demandait si elle devait continuer ou remettre cette discussion à plus tard ! Voir son frère, tiens cela lui venait sans réfléchir, fléchir en s'asseyant sur un banc, la tête entre les mains, était-ce mauvais signe ? Comment décrypter quelqu'un lorsqu'on ne connait pas cette personne ? La jeune femme aurait voulu s'arrêter sur les révélations et parler de la pluie et du beau temps, lorsqu'Ethan l'invita à poursuivre.

- Le monde est extrêmement petit bien plus qu'on ne peut l'imaginer ! Si tu veux que j'arrête tu n'auras qu'à me le dire ! Bon je vais poursuivre avec ton père et ce que je sais de lui. Il ait courtisé par un grand nombre d'élèves et sort avec Mélinda Marrens la professeur de danse, il est le proviseur de Berkeley mais c'était aussi le meilleur ami de mon père. Donc je te laisse imaginer si ce dernier avait découvert ton existence, quoi que de son côté, il n'était pas vraiment mieux. Quand à ta mère, comment t'en parler...

La jeune femme n'avait jamais connu sa mère, quasi absente, elle lui en a beaucoup voulu car l'amour maternelle lui avait véritablement manqué. Élevée par son père jusqu'à son décès, elle n'a jamais considéré sa mère comme telle, même si aujourd'hui cette dernière cherche à se faire pardonner, Amy n'est pas encore prête à lui pardonner.

- La vérité, c'est que je ne la connais pas ! Pendant 20 ans, j'ai vécu avec une inconnue, c'est mon père qui m'a élevé. Notre mère est la directrice de la chaîne CNN, et n'a jamais su élever un enfant de sa vie ! Elle est très solitaire et réservée, ces derniers temps, elle a essayé de se faire pardonner son absence mais pour moi c'est encore dure à accepter et puis l'argent ne fait pas tout !

Invité

J’écoutai ma sœur parler en silence, fixant mes mains croisées entre mes genoux. Étrangement, j’avais beaucoup moins de curiosité pour mes parents biologiques pour ces deux sœurs dont je venais d’apprendre l’existence. Pourtant, je ne pensais pas leur en vouloir. Comment peut-on avoir de la rancune vis à vis d’inconnus parfaits ? Non, ceux à qui j’en voulais, c’était à mes parents adoptifs qui durant toutes ces années ne m’avaient rien dit et m’avaient laissé m’écarter d’eux sans rien dire. M’avaient-ils plus désiré que mes vrais parents finalement ?

Amy me présenta donc brièvement mon père que je connaissais déjà comme le directeur de l’université et ma mère qui selon ses dires n’avait jamais été très douée pour le rôle. J’ignorais si j’aurais un jour le désir de les rencontrer, de me présenter à eux. Pour le moment, ce n’était pas le cas. Avant toute chose, il me fallait d’abord intégrer toutes ces informations, me faire à cette sorte de nouvelle identité. J’ignorais le temps que ça prendrait si tant est que j’y parvienne un jour.

J’avais grandi en fils unique et en dépit de mes tendances solitaires, j’avais toujours regretté de ne pas avoir de frère ou de sœur avec qui partager ces liens si forts que l’on ne retrouve qu’au sein d’une fratrie. À présent, je découvrais qu’on m’avait privé de sœurs bien réelles et j’avais peur de ne jamais parvenir à rattraper ce temps qu’on nous avait volé. Pourrais-je un jour les considérer véritablement comme mes sœurs ? Nouer avec elles ces liens qui m’avaient manqué dans mon enfance ? Les années passées à grandir loin les uns des autres avaient peut-être irrémédiablement enterré ces liens.

Je fis de mon mieux pour chasser ces sobres pensées et gardai le regard rivé sur le sol devant moi pour ne pas alarmer Amy. Je n’étais pas du genre à exprimer ou à montrer trop ostensiblement ce que je ressentais. D’autant que sa position de messagère n’était pas forcément plus facile à gérer que la mienne. Lorsque je me fus composé une expression plus rassurante, je tournai la tête vers elle t mon regard se porta immédiatement sur l’alliance qui brillait à son annulaire gauche. Prenant sa main, je l’observai de plus près avant de lancer à ma sœur un regard interrogatif.

Je sentais le regard d'Ethan posé sur ma main, celle où on pouvait aisément voir mon alliance. Que dire à ce sujet à part que Sam avait été l'homme de ma vie et qu'il le resterait même si je sentais qu'on s'éloignait un peu. Mon sourire s'effaça, il fallait en parler lui dire maintenant qui j'étais, ce que je représentais et lui parler de la famille que j'avais fondé et pourtant je n'en avais pas eu envie. Peut-être avais-je peur de voir tout ça s'écrouler d'un moment à l'autre.

- Comme tu peux le voir, je me suis mariée ! Mon époux s'appelle Sam, j'ai aussi un fils Mathéo !

Je sortis une photo de mon portefeuille et la tendit à Ethan. Dessus on y voyait Mathéo dans les bras de Sam.

- Ils sont tout les deux très complices ! Mais son véritable père s'appelle Joseph Jonas, c'est une très longue histoire ! Et puis je suis enceinte de 4 mois, d'une petite fille !

Elle lui épargnait les détails, de son histoire, parce qu'elle était à la fois longue et éprouvante à raconter.

- Les joies de la famille ! Tu viens d'entrer dans une famille de fou Ethan, je te souhaite la bienvenue ! Dis-je en retrouvant petit à petit le sourire.

Invité

Amy hésita un instant avant de me parler de son époux et de son fils. Son hésitation et le fait qu’elle ne m’en ait pas parlé spontanément plus tôt me poussa à m’interroger. Ma nature profonde reprenait le dessus et je me surpris à me faire du souci pour cette sœur que je connaissais à peine. Était-elle heureuse ? Elle tenta de faire un peu d’humour, mais je sentais bien qu’elle prenait soin de ne pas me faire part de certaines choses douloureuses.

Je m’abstins de poser la moindre question cependant. Il n’était pas encore temps de se faire des confidences et avant de m’engager plus avant dans ma relation avec ma sœur, je devais d’abord me faire à son existence. J’avais eu un nouveau choc lorsqu’elle m’avait montré la photo de son fils. S’il n’avait été dans les bras de son père, on aurait juré une photo de moi au même âge. Il aurait suffit de poser celle qu’Amy avait trouvée dans les affaires de sa mère pour s’en rendre compte. Cette ressemblance frappante rendait les choses encore plus réelles et il me fallait du temps pour me faire à l’idée.

Après quelques instants de silence, je finis par me lever du banc, aussitôt imité par ma sœur. Je me tournai alors vers elle, cherchant mes mots.

- Je… J’ai besoin d’un peu de temps pour me faire à tout ça. Ce matin en me levant, j’étais fils unique et j’avais coupé les ponts avec ma seule famille. Et maintenant, je me retrouve avec deux sœurs, un beau frère, un neveu, bientôt une nièce, de nouveaux parents…

Je laissai échapper un soupir las. La tête me tournait de repenser à tous ces noms qu’elle avait mentionnés.

- Je t’avoue que je suis un peu perdu. J’ai besoin de réfléchir pour savoir où est ma place dans cette famille de fous comme tu dis.

Je sortis à nouveau la fameuse photo de ma poche et m’accroupis devant le banc sur lequel je la posai à l’envers. Levant la tête vers Amy, je demandai alors, faisant de mon mieux pour paraître serein.

- Tu aurais un stylo pour que je note ton numéro ?

Tandis qu’elle fouillait dans son sac pour me donner de quoi écrire, j’ajoutai d’un ton bienveillant.

- Je ne sais pas si on pourra rattraper le temps perdu, mais je te promets de te faire signe quand je serai prêt.

Je regardais mon frère perdu dans ses pensées. Je savais qu'il réalisait à peine tout ce que je venais de lui apprendre et je me sentais coupable. Je comprenais parfaitement qu'il est besoin de temps et j'espérai juste qu'il ne ressortirait pas de ma vie aussi vite qu'il y était apparu. Il me demande de lui donner de quoi écrire, ce que je m'exécuta à faire.

- Je comprends ne t'inquiète pas ! Prend tout le temps qu'il te faudra ! Mon numéro c'est le 06.10.23.35.67, j'habite dans le quartier de Pacific Heights donc si l'envie t'en prend de venir nous voir, je suis au numéro 42 ! J'espère simplement ne pas te perdre et pouvoir apprendre à te connaître un peu mieux. Bon il faut que j'y aille, j'ai encore des articles à distribuer à mes rédacteurs ! J'attends un signe de toi !

Sur ses mots, elle se leva, et se dirigea vers sa voiture, la tête remplis de question. Mais elle avait eu la chance de le rencontrer, lui son frère qu'elle n'avait vu que sur une photo. Fière d'avoir pris son courage entre ses mains, elle s'éloigna un sourire léger affichait sur son visage.

Spoiler:

Invité

Dès qu’Amy me tendis son stylo, je notai scrupuleusement toutes les informations qu’elle me donnait à l’arrière de la photo. J’ignorai combien de temps il me faudrait, mais je savais qu’un jour je lui ferais signe et qu’alors nous pourrions apprendre à mieux nous connaitre. Lorsqu’elle eut terminé, je lui rendis son stylo et je la regardai s’éloigner et monter dans sa voiture. Elle démarra et je me mis à mon tour en route. J’avais besoin de marcher pour y voir plus clair.

Sans un regard pour la vue magnifique qu’offrait la baie de San Francisco, je m’engageai dans les rues de la ville, marchant au hasard comme si j’avais voulu m’y perdre. Mille et une questions se bousculaient dans ma tête. Devais-je contacter mes parents adoptifs pour leur dire que je savais tout ? Ça faisait maintenant 7 ans que j’étais parti. Une explication avec eux valait-elle vraiment la peine ? Et mes vrais parents ? Avais-je envie de les rencontrer ? Devais-je le faire ? Devais-je leur dévoiler mon existence ? Me présenter à eux ? Et Demi ? Elle avait e droit de savoir. Comment le lui dire ? Amy l’avait-elle déjà fait ?

Toutes ces questions me donnaient mal à la tête et je finis par m’arrêter de marcher. Mes pas m’avaient conduit dans une ruelle déserte à cette heure. À en juger par les poubelles qu’il y avait devant moi, je devais me trouver à l’arrière d’un restaurant. Je m’appuyai alors des deux mains sur le mur le plus proche et fermai les yeux, essayant de respirer profondément. Alors, sans que je puisse me contrôler, mon poing vint s’écraser contre la pierre et me retournant, je me laissai glisser, accroupi le dos contre le mur. Le trop plein d’émotion déborda et je laissai les larmes couler de longues minutes sans me soucier de mon poing écorché.

SUJET TERMINÉ

» La découverte...
» Retrouvaille entre frère et soeur ( Emy et Sam)
» Rencontre entre Erin et Ethan
» Envie / Découverte ( Chelsey & Andrew )
» Il faut toujours regarder devant soi [Pv Ethan]

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