Rencontre entre Erin et Ethan

Je possédais un minuscule studio non loin du campus de l’université mais j’y restais en général que pour dormir. Le reste du temps, je préférais sortir et arpenter les rues de San Francisco à la recherche d’un endroit où m’arrêter pour me plonger dans ma lecture du moment. Je n’avais jamais aimé être enfermé. Et même lorsqu’il faisait mauvais temps, je préférais lire debout sous un porche plutôt qu’entre quatre murs. Fort heureusement, cette situation ne se présentait que rarement en Californie.

Ce jour là, mes pas me conduisirent jusqu’à la plage. Habituellement noire de monde, elle n’était pas mon lieu de prédilection. Mais aujourd’hui, il y avait moins d’affluence qu’à l’accoutumée. Aussi, je décidai de m’installer sur le sable pour m’adonner à mon passe temps favori. Retirant chaussures et chaussettes pour les prendre à la main, je m’avançai sur le sable, marchant d’un pas souple jusqu’au bord de l’eau. Une légère brise caressait mon visage, rendant la température extérieure agréable et l’atmosphère moins étouffante.

Parvenu au rivage, je m’assis sur le sol et remontai le bas de mon jean pour laisser les vagues venir lécher mes pieds sans top le détremper. Je restai ainsi un instant, laissant mon regard se perdre dans l’immensité de l’océan qui s’étendait devant moi. Puis, revenant à la réalité, je pris le livre de poche qui dépassait de ma poche arrière et l’ouvrit là où une page cornée m’indiquait l’état de ma progression. Jaugeant l’épaisseur de ce qui me restait à lire, j’estimai en avoir encore pour deux heures. Je soupirai doucement, regrettant déjà ces quelques pages.

Il me semblait toujours nouer avec chaque livre une relation particulière. J’aurais presque pu comparer ça à une relation amoureuse. Il y avait d’abord une phase durant laquelle on faisait connaissance. Je découvrais l’ouvrage et au travers de sa couverture, j’appréhendais déjà les mystères qu’il pouvait receler. Puis les présentations faites, venait le temps d’ouvrir la première page. Et déjà il semblait que la relation devenait plus intime. Au fil des mots, l’ouvrage me livrait son histoire et partageait avec moi le moindre secret qui pouvait se cacher dans ses lignes. Puis alors que je parcourais les derniers chapitres, l’amertume de la séparation à venir commençait à se faire sentir. Lorsqu’enfin je refermais le livre, je me surprenais toujours à effleurer respectueusement la quatrième de couverture en un geste d’adieu.

J’étais plongé dans ma lecture depuis environ une petite demi-heure lorsqu’une ombre sur les pages me fit lever la tête. Mettant ma main gauche en visière au dessus de mes yeux pour me protéger du soleil, je souris à l’amazone qui se tenait devant moi. Elle portait un maillot de bain rouge et noir qui mettait ses formes en valeur sans être vulgaire. Lorsqu’elle s’assit sur le sol à son tour pour se mettre à ma hauteur, je pus voir son visage et reconnut l’une des filles qui suivait comme moi la formation théâtre à l’université. Fouillant dans ma mémoire, je tentai de remettre un nom sur son visage tandis qu’elle prenait la parole.